À la recherche des meilleurs équilibres minéraux

Publié le 2 novembre 2022

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Une nutrition équilibrée est-elle un atout agronomique ? Une analyse de sol peut-elle apporter des réponses à des impasses techniques ? Pourquoi mes fourrages n’ont pas de bonnes valeurs alimentaires ?
Toutes ces questions ont pourtant un point commun. Elles nous ramènent, bien évidemment, à une bonne gestion des sols. Mais est-ce que la stratégie de fertilisation choisie est adaptée aux objectifs fixés ?

Quelle analyse de sol choisir ?

Comme rien ne se créé et tout se transforme, il est important de partir du postulat que les éléments minéraux doivent être présents dans le sol. Une analyse est donc un outil intéressant pour déterminer leurs niveaux de présence. Par contre, le type d’analyse doit être choisi en fonction de ses objectifs. En effet, selon la méthode d’extraction, le résultat ne sera pas le même. Le choix de l’extractant est donc déterminant pour comprendre la fraction du sol extraite et l’interprétation de la solubilité des éléments qui en résulte.

  • Une analyse « classique » réalisée à l’acétate d’ammonium ou Mehlich-3 d’une analyse Kinsey Albrecht, nous indique la quantité d’éléments présents sur la CEC (Capacité d’Échange Cationique). Ces minéraux peuvent être présents dans notre sol mais la solubilité n’est pas certaine. C’est-à-dire que nous ne sommes pas sûrs que la plante peut assimiler tout de suite le calcium, le potassium, le magnésium, le zinc, le cuivre (…) mesurés par l’analyse. Cet angle est cependant intéressant pour détecter les déséquilibres et les corriger. En revanche, il est indispensable de mettre en place une stratégie pour assurer la solubilisation des éléments nutritifs et ainsi la nutrition des cultures et des couverts.
  • Des analyses de sol armées d’acides plus forts (aquarégia) permettent de visualiser les réserves du sol à long terme. Ce regard aide à gérer des stratégies d’amendements pour assurer des stocks d’éléments cohérents avec les équilibres. C’est-à-dire qu’un sol peut avoir une bonne saturation en calcium sur la CEC mais peut avoir une faible réserve en calcium. C’est par exemple le cas des sols du bassin armoricain. Les apports d’engrais de ferme des systèmes de polyculture élevage maintiennent du calcium sur la CEC mais les sols sont naturellement pauvres en calcium. Des apports de carbonate de calcium permettent de neutraliser l’acidité de réserve forte et les risques de toxicité aluminique.
  • Les analyses avec des acides faibles tels que H3A des Haney test (acides citrique, malique et oxalique), H 2 O pur ou saturée en CO 2 qui ont pour objectif d’imiter les exsudats racinaires et faire ressortir les éléments directement assimilables. Pour une interprétation fine, ce type d’analyse de sols doit être réalisé plusieurs fois dans la saison afin de comprendre la disponibilité des éléments à un instant précis. Si une seule analyse est réalisée en hiver ou en été par exemple, la solubilité n’est souvent pas représentative de toute la saison de croissance. De plus si un élément n’est pas présent en quantité suffisante avec ce mode d’extraction, il reste difficile de déterminer s’il s’agit d’un manque de réserve dans le sol ou uniquement d’un problème de solubilisation.

Pour mieux suivre la nutrition des plantes, l’approche la plus complète est une combinaison judicieuse entre les différentes technologies d’analyses. Cela peut permettre d’identifier les questionnements et les stratégies de fertilisation à la fois de court terme pour assurer un rendement ainsi que la qualité souhaitée mais également les stratégies de long terme pour garantir des réserves et un effet tampon de nos pratiques.
Ainsi et au delà du choix d’analyse, l’important est de savoir l’interpréter afin d’établir la stratégie de nutrition la plus appropriée pour nos cultures et par transition, nos animaux.

Dans ces différents sols, nous pouvoir voir que la fraction de calcium « soluble » est très fortement variable de 2% à 59% indépendamment des réserves. Cette fraction n’est pas proportionnelle à la quantité de calcium
présente sur la CEC ou en réserve dans le sol. Néanmoins, un sol pauvre en calcium de réserve (calcium total) verra ses propriétés physiques dégradées. Tous ces compartiments sont importants à observer d’autant plus que la fraction soluble peut évoluer au cours de la saison de croissance.

L’équilibre de la nutrition calcique et potassique

Le potassium, élément indispensable pour la migration des sucres vers les fruits, est souvent mal piloté ; soit en excès, soit en carence. Les sols équilibrés sont rares. Une plante suralimentée en potassium craint plus le gel, fend et se conserve mal. La sur-fertilisation potassique est souvent le résultat d’apports excessifs de matières organiques (fumier, compost, lisier, restitution des pailles), comme dans les potagers avec les cendres de bois en supplément. Un sol riche en potassium retient plus d’eau ; cependant un sol trop riche en potassium peut perdre sa cohésion. En effet le potassium monovalent (une seule liaison chimique K+) ne peut pas faire floculer les argiles ; au contraire, il a tendance à les disperser.
A l’inverse la carence limite le potentiel de rendement, la biomasse, le remplissage et la coloration des fruits (PMG). Des apports donnent des résultats rapides qu’ils soient au sol ou en foliaire (voir l’essai ci-joint). Cependant des apports au sol sont souvent une bonne stratégie de moyen et à long terme. Le potassium, c’est l’air dans un pneu : s’il n’y en a pas assez nous sommes à plat ; s’il y en a trop, ça éclate !

Dans l’essai ci-joint, nous pouvons observer la réponse à la fertilisation foliaire phospho-potassique du colza. Au stade floraison, une application de MKP (0-52-34) a été réalisée avec le passage de fongicide. L’objectif de l’application est d’aider le colza lors de la phase de remplissage des siliques afin d’améliorer le potentiel de rendement. La dose d’application varie de 0 à 8 kg en un seul passage. Nous pouvons observer une réponse positive sur le rendement en une seule application. La remobilisation des ressources profondes est pertinente à l’aide des couverts végétaux comme l’avoine ou les graminées estivales. Le potassium constitue une fraction importante de la biomasse végétale. Le retour au sol des résidus des cultures ou des couverts végétaux permet de constituer un stock de potassium en surface. Une tonne de matière sèche mobilise environ 30uK. Les racines puissantes des couverts végétaux aident à puiser le potassium dans des horizons du sol profond. Une fois que le couvert végétal est détruit, ce potassium est ensuite disponible pour les cultures suivantes. La vitesse de dégradation des résidus est clé pour une bonne disponibilité du potassium
dans la culture suivante. Des résidus non dégradés peuvent hypothéquer une grande partie du potassium disponible dans le sol.

Le calcium

Le calcium souvent considéré uniquement comme un amendement pour corriger des défauts de pH, est un élément important pour la croissance des végétaux. C’est l’élément de structure : il permet de rigidifier les parois des cellules. Le calcium est aussi indispensable lors des processus de division cellulaire (par exemple des apports de gypse sont réalisés en sortie d’hiver sur les pommiers pour soutenir la division cellulaire et favoriser le calibre). Le calcium permet d’augmenter la production de pectine qui rigidifie les plantes. Cette pectine constitue les parois digestibles des plantes. Une bonne fertilisation calcique permet d’améliorer la digestibilité des fourrages tout en augmentant leur valeur énergétique (même dans la luzerne et les prairies). Une luzerne bien alimentée en calcium a une tige pleine, se conserve mieux, sèche mieux et garde plus
facilement ses feuilles. Le calcium est absorbé quotidiennement par les racines de la plante. Cet élément immobile ne peut pas être remobilisé dans la plante en cas de défaut d’alimentation. Pour soutenir son assimilation, les apports de bore sont indispensables. Le bore permet de réguler l’évapotranspiration de la plante et créer le flux de sève pour assimiler le calcium du sol. De plus, le bore stimule la libération d’exsudats
racinaires, un atout pour solubiliser le calcium du sol par l’activité biologique. La fertilisation calcique peut se décliner de différentes manières : un apport de calcium ou l’amélioration de la solubilité du calcium du sol.
Les apports de calcium soluble se traduisent par :

  • L’usage de carbonate de calcium en sols acides pour les rendre solubles ;
  • Des chaux éteintes (écumes…) à petite doses ~1T ;
  • Des carbonates de calcium très fin (<2µm) directement assimilable par la plante ;
  • Du nitrate de chaux : facilement disponible pour la plante avec un apport d’azote en complément ;
  • Du gypse : n’impacte pas le pH et libère en plus du calcium, du soufre ; une forme souvent plébiscitée.

Pour améliorer la solubilité du calcium du sol, des apports d’« acides » sont nécessaires :

  • Le soufre élémentaire qui libère 4 protons H+ lors de sa transformation en sulfate ;
  • Des apports de sulfates (de magnésie, de potassium, d’ammonium…) ;
  • Des acides citriques, lactiques… fabriqués par l’activité biologique…

Les apports de calcium doivent être calculés afin que la libération corresponde à la période de division cellulaire de la plante pour maximiser les impacts sur le rendement et la qualité des fruits. Un sol calcaire ne signifie pas forcément une bonne nutrition en calcium. Les conditions de disponibilité et d’absorption doivent être réunies pour assurer une bonne alimentation calcique. A ce niveau, des analyses de sol et des analyses de sève de la culture peuvent donner de bons éclairages.
Enfin, l’équilibre Ca/K est essentiel pour obtenir des cultures de qualité. L’outil le plus performant pour juger l’assimilation de calcium est une analyse de sève qui nous indique directement le niveau de nutrition de la plante. Gardons comme règle qu’il convient d’avoir beaucoup de calcium au début et suffisamment de potassium en fin de cycle pour le remplissage.

Pour en savoir plus sur les analyses proposées par Cerfrance Mayenne – Sarthe , rendez-vous sur notre site :

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